La gestion vertueuse des forêts, un enjeu prioritaire de la transition écologique
Les modes de vie actuels reposent sur une exploitation toujours plus forte des ressources de la Terre, au point de dépasser chaque année ses capacités de régénération naturelle. Parmi ces ressources essentielles : les forêts. Leur exploitation excessive a des effets dévastateurs sur la planète et le vivant et accentue les effets du dérèglement climatique. C'est pourquoi protéger les écosystèmes forestiers est une dimension fondamentale de la transition écologique. Un défi d’envergure dont se saisit la Fondation de France en soutenant des associations qui agissent en faveur d’une gestion vertueuse des forêts, plus sobre et respectueuse de leur rythme de renouvellement naturel. Focus sur 3 d'entre elles.
Les forêts sont indispensables pour l’équilibre écologique : elles abritent une biodiversité riche et variée, limitent l’érosion des sols, favorisent la préservation de l’eau, et améliorent la qualité de l’air grâce à la captation du dioxyde de carbone. Elles représentent le deuxième puits de carbone mondial derrière les océans, selon l’Office national des forêts (ONF) . Au niveau mondial, leur surexploitation a des effets dramatiques. D'après l’Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) , 420 millions d’hectares de forêt, soit environ 10% des forêts du monde, ont disparu entre 1990 et 2020. En cause : les modes actuels de production agricole et d’élevage, en particulier dans les régions tropicales humides où les espaces forestiers sont victimes de la culture de denrées destinées à l’exportation.
A contrario, en France, les forêts représentent 31 % du territoire métropolitain et gagnent du terrain tous les ans depuis près de 40 ans selon l’ONF (+ 0,6 % environ chaque année). Mais elles sont aussi de plus en plus durement confrontées aux conséquences d’un dérèglement climatique trop rapide pour leur permettre de s’adapter. La Fondation de France, aux côtés de la Fondation Anyama et de plusieurs associations engagées pour la protection du vivant, a fait de la gestion vertueuse des forêts une priorité pour les années à venir.
Son ambition : fédérer tous les acteurs de l’intérêt général autour d’une stratégie commune pour restaurer et maintenir un bon état de fonctionnement de l’écosystème forestier, en bannissant les actions destructrices, comme les coupes rases suivies de la plantation d’arbres en monoculture ou du déploiement d’une sylviculture industrialisée. « Les forêts françaises sont riches d’une grande diversité et contribuent directement aux bonnes conditions de vie des citoyens, sans être dépendantes des interventions humaines pour fonctionner. Il est essentiel de préserver leurs fonctions environnementales : c’est la clé pour les rendre résilientes et efficaces face au dérèglement climatique, améliorer la qualité et la diversité biologique qu’elles abritent et subvenir de manière raisonnée et responsable aux besoins sociétaux », explique Victor Michalland, copilote du Collectif d'action Transition écologique juste et solidaire à la Fondation de France.
Association Sylv’ACCTES : œuvrer collectivement pour une sylviculture durable
Restaurer, accompagner et enrichir les forêts : tels sont les trois grands principes d’action de l’association Sylv’ACCTES , soutenue par la Fondation de France. Depuis 2016, elle défend les vertus d’une sylviculture durable pour le climat, la biodiversité et les paysages en impliquant tous les acteurs concernés par la forêt. Les projets qu’elle met en œuvre sont le fruit d’une concertation locale entre les propriétaires forestiers (publics ou privés), les collectivités, les associations de protection de la nature, etc. L'objectif : une gestion vertueuse collective des forêts prenant en compte enjeux écologiques et dimensions économiques et sociales.
« Notre démarche de concertation se déroule en trois étapes, explique Loïc Casset, Délégué général de l’association Sylv’ACCTES. Elle commence par une discussion élargie avec tous les acteurs concernés sur un territoire, afin que les différents points de vue se rencontrent et qu’on se mette tous d’accord sur ce qui rend la forêt aussi importante pour le territoire. Vient ensuite une phase de travail technique avec les gestionnaires forestiers pour définir des modalités d’action adaptées, et enfin la validation du bénéfice des actions envisagées et de leur conformité avec nos valeurs et le cadre légal. La forêt est un enjeu d’intérêt général. Y répondre efficacement implique donc nécessairement un travail collectif. »
Au sein de ses 29 massifs forestiers partenaires situés dans les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie et Grand-Est, l’association accompagne l’adaptation des forêts au contexte climatique et la restauration de leurs dynamiques fonctionnelles. Elle agit notamment pour préserver les sols forestiers et favoriser la cohabitation d’essences d’arbres différentes et de hauteurs variées afin de renforcer la résilience des forêts. L’association intervient par exemple en faveur de la restauration des écosystèmes forestiers et de la diversification progressive des peuplements résineux (sapin pectiné, épicéa, mélange des deux essences) dans les forêts du Pays de Remiremont et du Pays de la Déodatie (Vosges).
Sur l’ensemble des territoires où elle intervient, l’association met en œuvre des modes d’actions complémentaires. En agissant sur la gestion de la lumière, elle favorise par exemple une meilleure germination des graines présentes dans les sols forestiers et accompagne ainsi le phénomène naturel de pousse des arbres. Elle intervient également pour remettre en gestion des parcelles abandonnées suite à des tempêtes ou des dommages causés par les scolytes, et pour l’introduction raisonnée de nouvelles essences d’arbres capables de s’épanouir dans les conditions climatiques environnantes.
Association Forêts Alpines : étudier la forêt pour mieux la protéger
Dans le département des Hautes-Alpes, l’association Forêts Alpines ambitionne de réunir toutes les expertises et envies d’agir pour donner naissance à une gestion plus vertueuse et raisonnée des forêts du territoire. Elle s’appuie notamment sur un observatoire scientifique qui analyse les changements impactant les écosystèmes forestiers. Par exemple, dans le cadre du projet « Forêts communes » soutenu par la Fondation de France, une étude a été menée dans le village de Villard Saint-Pancrace sur les effets du réchauffement climatique sur le mélèze, notamment en termes de stress hydrique. Pour compléter ces recherches, des expérimentations scientifiques, basées sur la plantation de quatre types d’arbres différents à des altitudes variées et sur le suivi de leurs comportements respectifs, ont été lancées. L’objectif : aider les forêts à devenir plus résilientes en préservant les essences d’arbres qui font partie de l’écosystème local, tout en intégrant raisonnablement de nouvelles espèces adaptées à ces environnements.
L’association favorise également le partage des informations recueillies lors d’événements qui rassemblent scientifiques, citoyens, organisations et tout autre acteur sensible à la protection des forêts. En septembre dernier, elle s’est à ce titre associée aux Rencontres nationales des sciences participatives autour du thème : « Comment améliorer le lien recherche - société civile à travers les sciences participatives pour la transition écologique ? ».
Association Pro Silva France : former les professionnels à la gestion vertueuse des forêts
La mission de l’association Pro Silva France : préserver des forêts qui répondent à une multitude de besoins (écologiques, sociaux et économiques) en s’appuyant sur leurs dynamiques naturelles. Pour cela, elle rassemble les différents acteurs forestiers (propriétaires, professionnels, gestionnaires, etc.) afin qu’ils construisent ensemble des modes de gestion vertueux de la forêt. L’association, soutenue par la Fondation de France, défend le principe de la sylviculture mélangée à couvert continu (SMCC). Celui-ci consiste à maintenir le couvert forestier grâce à la limitation des coupes de bois et au mélange d’essences pour enrichir la structure naturelle de la forêt.
Depuis 2011, l’association développe chaque année plusieurs sessions de formation à la SMCC à destination des gestionnaires et des propriétaires forestiers, mais aussi des partenaires territoriaux, des agents de l’ONF, des écoles et établissements d’enseignements forestiers, des élus locaux ou encore des représentants de parcs naturels régionaux. Les modules sont variés et adaptés aux besoins des différents acteurs ainsi qu’aux spécificités de chaque territoire : assimilation des bases et des grands principes de la SMCC, méthodologie de martelage des arbres (choix des arbres à maintenir ou à prélever selon des critères précis), construction d’une stratégie sylvicole sur le long terme, etc.
Des actions qui portent leurs fruits : selon une étude de l’association, le nombre d’hectares de forêts privées gérés en SMCC est en évolution constante (207 000 ha en 2020, soit + 11 % par rapport à 2015), alors que la surface de forêts publiques, également en croissance régulière, atteignait 1,1 million d’hectares en 2020.
Crédit photos : Association Sylv'ACCTES
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