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La philanthropie face aux défis environnementaux : pour une transition écologique pour tous et par tous

10 mars 2025

Parce qu’elle impose de transformer les manières d→e vivre et de consommer de tous les citoyens, la transition écologique doit être juste et solidaire. Fortes de cette conviction, les fondations privilégient une approche globale, soutenant des projets qui mêlent économie, justice sociale, écologie et gouvernance collective. Le point sur les axes de leur engagement, à l’occasion de la parution de l’étude* menée par l’Observatoire Philanthropie & Société de la Fondation de France.

C’est pour beaucoup LE défi du XXIème siècle, et sans doute l’un des plus difficiles à relever. Face au dérèglement climatique, la transition écologique est désormais au cœur de toutes les préoccupations, seule issue pour préserver l’avenir de nos sociétés et de la planète. Engagées de longue date dans de nombreux domaines (recherche, conservation, préservation de la biodiversité, …), les fondations sont aujourd’hui de plus en plus nombreuses à repenser leurs actions dans une approche plus globale. « La philanthropie prend la mesure de la complexité des enjeux environnementaux, notamment l’intrication des différents champs concernés. Face à cela, elle fait le choix de renforcer son impact en abordant le sujet de façon systémique et transversale » confirme Anne Monnier, chercheuse à la chaire Philanthropie de l’Essec et co-auteure de l’étude "La philanthropie face aux défis environnementaux" * menée par l’Observatoire Philanthropie et Société.

L’objectif est de privilégier des projets qui produisent un impact positif sur l’environnement et sur l’ensemble des activités humaines : santé, agriculture, alimentation, habitat, économie, géopolitique mais aussi équité sociale. Fidèles à leur mission d’aide aux plus fragiles et conscientes que la transition ne pourra se faire que si elle est portée par tous, les fondations militent aussi de façon active pour une transition juste, rappelant que les populations les plus vulnérables sont aussi celles qui sont, et seront, les plus touchées par le dérèglement climatique.  

 « Nous sommes engagés dans une transition écologique à la fois systémique, citoyenne et solidaire, confirme Laetitia Bertholet, responsable Climat et biodiversité à la Fondation de France. Pour cela, nous travaillons au croisement de l’écologie, de la justice sociale et de l’économie, avec une conviction : nous ne pourrons relever le défi qu’en repensant nos modes de vie ; en favorisant l’émergence d’une société plus sobre et plus juste socialement, basée sur l’implication de tous ».

Pierres angulaires de la transition, ces sujets sont ceux où la réflexion systémique est la plus élaborée, avec des projets qui s’articulent autour de toute une chaîne de valeur, qu’il s’agisse d’agriculture et d’alimentation, d’habitat et d’énergie...

 D’une agriculture vertueuse à une alimentation saine

La Fondation Carasso par exemple aborde le sujet de l’alimentation « de la graine au compost » avec un soutien à des projets tels que le programme TETRAA  mené avec AgroParisTech au sein de 9 territoires pilotes, dans le but d’accélérer la transition agroécologique et alimentaire. Les initiatives sont multiples : aide à l’installation de projets agroécologiques, promotion des produits locaux et durables, sensibilisation des agriculteurs aux pratiques préservant la qualité de l’eau et la fertilité des sols ; le tout en renforçant l’inclusion des acteurs dans les prises de décision.

Avec la Fondation Carasso, la Fondation Le Tilleul et la Fondation groupe EDF, la Fondation de France soutient, dans le même esprit, l’association rouennaise Triticum , qui milite pour la recréation d’une filière de céréales anciennes (baptisées « POP »), cultivées sans pesticides ni intrants chimiques. Triticum réunit paysans, meuniers et boulangers qui œuvrent à la fabrication de pains au levain 100 % artisanal, produit à partir des grains POP, sans levure boulangère ni améliorant.

Fondée sur la conviction que l’homme a besoin d’une nature préservée pour vivre en harmonie, la Fondation pour la Nature et l’Homme  privilégie des initiatives qui infusent toute la société et prennent en compte les plus fragiles. « Nos actions s’articulent autour de trois grands programmes : biodiversité, agriculture et alimentation, explique Stéphanie Clément Grandcourt, directrice générale. Parmi les actions de la fondation, le soutien à l’opération « Mon restau responsable » est l’un des plus emblématiques. Avec 3,8 milliards de repas servis par an en France, la restauration collective est un levier-clé pour favoriser l’émergence de filières agricoles durables et une alimentation saine. Ce programme accompagne ainsi les cantines des écoles, des hôpitaux, des entreprises… dans l’amélioration de leurs pratiques en leur proposant d’adhérer à « Mon restau responsable ». Plus de 2 000 restaurants participent déjà à l’aventure en servant 1,2 million de repas issus de filières agricoles durables et le dispositif prévoit maintenant d’investir les restaurants universitaires ». 

Pour une exploitation alternative de nos forêts

Déterminée à porter cette transition, la Fondation Terre Solidaire  amplifie ses actions pour la préservation des forêts, qui jouent un rôle fondamental dans l’équilibre écologique de la planète. Longtemps engagée à l’étranger, elle agit désormais en France explique Philippe Mayol, son directeur général. « Beaucoup de forêts françaises sont en mauvais état, touchées par les changements climatiques, une déforestation mal maîtrisée et une mauvaise gestion. Nous soutenons des associations comme Canopée forêt vivante  qui encourage les 3 millions de propriétaires de forêts à protéger leur patrimoine en diversifiant les espèces et en limitant la sylviculture intensive ». De son côté, la Fondation de France a également développé un programme de soutien sur le sujet comme par exemple avec l’association Sylv’ACCTES  qui propose une expertise et une aide aux propriétaires souhaitant s’engager pour une gestion améliorée de leur forêt. Le Fonds de dotation Anyama  a fait aussi de la gestion vertueuse des forêts sa priorité. Son objectif ? Fédérer tous les acteurs de l’intérêt général pour restaurer l’écosystème forestier en bannissant les actions destructrices comme les coupes rases, les plantations d’arbres en monoculture ou le développement d’une sylviculture industrialisée. 

Les actions pour la préservation des forêts jouent un rôle fondamental dans l’équilibre écologique de la planète. © C.Marcilhacy

Vers de nouvelles mobilités actives et vertueuses

De nombreuses fondations travaillent à une réflexion transversale sur le sujet des mobilités et de ses enjeux en termes de santé, d’économie et d’environnement urbain. La Fondation pour la Nature et l’Homme soutient par exemple les associations qui agissent avec les collectivités pour favoriser les transports en commun, la mobilité active ou l’électrification du parc automobile. « Nous œuvrons aussi à une production d’expertise autour de scénarios de transition ou de partage des routes qui ne seraient plus seulement dévolues à la voiture, poursuit Stéphanie Clément Grandcourt. Nous finançons des études pour imaginer des solutions concrètes pour les quelques 15 millions de personnes en France qui n’ont que la voiture pour se déplacer. Autant d’expertises portées ensuite sous forme de plaidoyers auprès du monde politique et économique ».

Contribuer au développement d’un habitat rénové et durable

Le logement constitue aussi l’un des enjeux clés de cette transition. La Fondation de France soutient notamment depuis plus de 20 ans des initiatives de réhabilitation et de construction qui intègrent une dimension environnementale forte (rénovation énergétique, utilisation de matériaux écologiques, …). Créée en 2020, la Fondation Castorama a choisi de soutenir les Compagnons Bâtisseurs de Nouvelle Aquitaine    qui aident des familles modestes à rénover leur logement, notamment pour améliorer l’isolation thermique. L’association Robin et toi  quant à elle mène à Grenoble des chantiers participatifs, éducatifs et solidaires pour construire de petits habitats écologiques destinés à loger des personnes en situation de précarité. Très concernée par l’idée d’une transition pour tous et par tous, la Fondation Castorama a choisi d’impliquer l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise (120 00 salariés) dans sa démarche, comme l’explique Fanny Rochart, responsable de l’engagement solidaire : « Les magasins en région sont autant de relais pour la fondation avec des équipes qui lancent les appels à projet et participent au comité exécutif pour donner leur avis. Les initiatives sont ensuite suivies par les salariés qui le souhaitent, dans un véritable engagement solidaire ».

Permettre à l’ensemble des citoyens d’être acteurs de cette transition, et reconnecter l’humain au vivant

Pour être l’affaire de tous, la transition doit aussi être pensée par tous. Dans cet esprit, les fondations multiplient les actions en faveur des plus jeunes, mais également du grand public.  

« Transformer les modes de vie et les comportements, par le biais de l’éducation aux activités de plein air par exemple, sont au cœur de notre mission, explique Cybèle de Brem, co-directrice de la Fondation Lemarchand. Nous accompagnons l’association Des Enfants et des arbres  qui emmène des classes planter des haies, ou encore l’association La Belle Vie qui sensibilise les personnels des crèches urbaines à végétaliser leurs centres. Nous soutenons aussi l’association Bloom  qui lutte contre les méthodes de pêche destructrices et sensibilise à d’autres modes de consommation. En tout, plus de 90 projets sont portés chaque année avec, pour fil rouge, la préservation de la nature ».

La Fondation Lemarchand a d’ailleurs rejoint l’appel à projets communs « Grandir en lien avec la nature », lancé en 2022, qui réunit la Fondation de France et les fondations abritées Iris, Nature et Découvertes, Terra Symbiosis, Léa Nature/ Jardin bio, Une Goutte d’Eau pour notre Planète, ainsi que le fonds de dotation Domorrow et la Fondation EDF. L’objectif ? Promouvoir une démarche commune de sensibilisation passant par le contact avec la nature en soutenant des associations, des écoles, des institutions publiques, des collectivités territoriales… La Fondation de France gère également le domaine de Branféré qui lui a été légué par sa propriétaire Hélène Jourde. Désormais responsable de ce lieu unique (magnifique refuge notamment pour de nombreuses espèces menacées), elle s’est associée à la Fondation pour la Nature et l’Homme afin de créer l’École de la Nature, dédiée à l’éducation à la nature et au développement durable.

Replacer chacun au cœur du vivant, la mission est au centre des actions de la Fondation pour la Nature et l’Homme qui soutient des associations proposant aux citoyens des journées de ramassage de déchets dans toutes les régions de France. Ou encore la Fondation Léa Nature / Jardin bio engagée auprès de l’association Wings of the Ocean  pour mener des actions de nettoyage des littoraux.

La Basse Cour 1 copiePour être l’affaire de tous, la transition doit aussi être pensée par tous. © Anne-Cécile Esteve

Vers une nouvelle façon de penser l’engagement philanthropique

Les fondations l’ont bien compris. Penser cette transition impose de mettre en œuvre des stratégies qui transforment en profondeur leur engagement. Comme le rappelait Edouard Morena, maître de conférences en sciences politiques à la University of London Institute in Paris, dans le cadre de la restitution de l’étude*, « avancer vers une transition juste, c’est avant tout repenser nos manières de fonctionner pour être plus en phase avec les réalités ». Parmi les sujets de réflexion, le développement d’une approche de long terme et d’une relation plus horizontale entre les fondations et les associations, explique Laetitia Bertholet : « Nous proposons aux structures que nous soutenons un accompagnement global qui dépasse le simple soutien financier. Nous développons une philanthropie fondée sur la confiance, avec un allégement des procédures de suivi et des liens plus directs avec les porteurs de projets ».

Autre évolution, la création de coalitions de fondations, à l’image de la Coalition française des fondations pour le Climat (Cffc) fondée en 2020. L’objectif ? Partager les expériences, penser et mettre en œuvre ensemble des actions plus impactantees, développer les liens avec d’autres parties prenantes de la société (pouvoirs publics, entreprises, ONG, …). Elle mène des actions de plaidoyer en France, en Europe avec le réseau de fondations européennes Philea, et à l’international avec la coalition Philanthropy for Climate.

Enfin, si la majorité des fondations revendiquent leur caractère apartisan, un nombre croissant se questionne sur l’engagement nécessaire de la philanthropie, relève dans l’étude Agnès Golfier, directrice opérationnelle de la Fondation Danielle Mitterrand  : « Nous sommes dans un moment de refermeture des espaces démocratiques sur les questions environnementales. En tant que fondation, nous avons une certaine liberté à dire les choses et pousser les sujets. Nous avons peut-être un rôle de lanceur d’alerte à jouer, au regard de l’urgence ». A l’évidence, la question est ouverte.

 (*) La philanthropie face aux défis environnementaux : enjeux et perspectives pour une transition juste