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Porquerolles : un « paradis » en mutation

27 septembre 2019

Ils vivent ou travaillent sur l’île de Porquerolles, un site exceptionnel fragilisé par la pression touristique et climatique. Avec le projet « Cap 2050 », soutenu par la Fondation de France, ils tentent de dessiner les contours d’une nouvelle relation à la nature. Explications.

Petite île paradisiaque à quelques kilomètres de la côte, en Méditerranée, Porquerolles s’étend sur 12km2. En hiver, l’île compte 350 habitants, pour atteindre en été 10 000 visiteurs par jour au pic de la saison touristique. Ajoutez à cela l’envolée des prix du logement qui chasse les jeunes, le changement climatique qui accélère les mutations forestières, l’assèchement des nappes phréatiques qui imposent un ravitaillement en eau douce par bateau, l’érosion du littoral qui grignote les plages, la hausse des températures de la mer et le piétinement touristique qui menacent les milieux naturels… Vous obtenez un concentré de problèmes créant une situation potentiellement explosive !

Comment concilier développement économique, culturel, agricole et préservation de paysages et de ressources naturelles si précieux : la question est au cœur du travail de Charlotte Michel, ingénieure et docteure en sciences de l’environnement, spécialiste des conflits d’usage dans les espaces naturels.  La Fondation de France a décidé de soutenir le projet de recherche participative « Cap 2050 », qu’elle mène depuis fin 2018 avec le Parc national de Port-Cros.

Poser les sujets de conflit sur la table

Cette recherche participative, repose sur une démarche originale. « Aujourd’hui, les gens sont saturés de concertation, souligne Charlotte Michel. Il faut trouver des alternatives aux traditionnelles réunions publiques ». Le projet Cap 2050 a « embarqué » trois associations partenaires, représentants les commerçants, les acteurs publics locaux et les résidents, y compris secondaires. Ainsi, sont d’emblée posés « autour de la table » des intérêts parfois contradictoires. Leur sujet de réflexion : le lien entre l’homme et la nature. Avec une méthode de travail : explorer ensemble des scénarios et des hypothèses très divers pour en mesurer les conséquences, les avantages et les inconvénients. Ce travail de prospective est enrichi par l’apport d’experts venus de différentes disciplines : une linguiste (analyse des écrits de touristes recueillis dans les « livres d’or » de la station), un philosophe (spécialiste de l’éthique environnementale), un historien de l’environnement, une experte du tourisme durable… tous présenteront leurs travaux et la discussion s’engagera lors d’ateliers-balades, sur sites. « Enfin, nous réfléchissons aussi à la dimension artistique du projet, complète Charlotte Michel. En mobilisant les artistes locaux et/ou des plasticiens liés à l’art contemporain ».

L’objectif ? « Comme toute étude exploratoire, elle réserve une part d’inconnu, répond la spécialiste. Nous allons écrire des fictions mêlant différentes manières de considérer les liens homme-nature : une nature sanctuarisée et sauvage, une nature hyper-domestiquée, une nature refuge… tout reste ouvert et personne ne peut dire aujourd’hui quels modèles de relations homme-nature va ressortir de ces travaux. D’ores et déjà, la démarche a une vertu : provoquer une prise de conscience partagée des enjeux, permettre à chaque acteur de « sortir de sa bulle » et de découvrir d’autres points de vue sur ce patrimoine commun. Mais en cela, le travail sur ce microcosme îlien, où les problèmes sont concentrés, est aussi un modèle intéressant pour tous les territoires ! »