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« Courir comme une fille : ma dernière énergie dans la bataille » - Nicole Abar

Points de vue 18 Jui.2024

Nicole Abar est ex-championne de football. Elle est engagée depuis plus de 20 ans pour sensibiliser les institutions publiques et le grand public aux inégalités femmes-hommes. Elle a notamment réalisé plusieurs documentaires, dont Passe la balle et plus récemment La conquête de l’espace, et multiplie les interventions dans les écoles pour éveiller les consciences sur les limites imposées aux filles dès l’enfance. Pour mener son combat, elle peut compter sur son énergie sans faille et la philanthropie.

Depuis plus de 20 ans, vous vous mobilisez pour lutter contre ces stéréotypes tellement intériorisés que chacun les reproduit sans s’en rendre compte. Avez-vous le sentiment que les consciences évoluent enfin et, qu’aujourd’hui, vous n’auriez plus besoin de prendre le prénom de Nicolas pour participer à un match de foot ?

Je dirais à la fois oui, un peu, et en même temps, pas vraiment, hélas. Il y a eu des avancées. J’ai pu présenter le 19 mars dernier mon nouveau documentaire La conquête de l’espace devant l’Assemblée nationale, 20 ans après Passe la balle. Je m’apprêtais à solliciter le Sénat pour faire la même opération, ce qui est compromis par les derniers événements politiques. Je précise d’ailleurs que ce documentaire de 30 mn est accessible à tous, et partageable sans modération. Chaque diffusion, c’est un petit pas de plus pour permettre à des petites filles de gagner du terrain.

Autre avancée notoire : pour la première fois, nous aurons des Jeux Olympiques 100 % paritaires. Pourtant, j’ai le sentiment que ce sujet de la motricité des filles, de l’accès au sport, de leur nécessaire conquête de l’espace, de leur relégation dans les cours de récréation... a du mal à émerger comme une cause prioritaire, à être vraiment pris au sérieux. Et pourtant, c’est un sujet fondamental. Je pense même qu’il constitue l’une des causes racines de l’inégalité femme-homme. J’en suis profondément convaincue, je l’ai vécu. On ne construit pas la même personnalité selon notre manière de se mouvoir et d’occuper l’espace lorsqu’on est enfant.

Autre illustration que l’histoire, hélas, est loin d’être finie : ce que j’ai vécu en 1998, alors que j’étais entraineuse de plusieurs équipes féminines de foot au club du Plessis-Robinson, vient de se reproduire à l’US Orléans. Les équipes féminines ont été reléguées en troisième division, pour permettre au Club de consacrer tous ses moyens aux équipes masculines. Mais ce fait divers a tout de même été évoqué à l’Assemblée nationale, c’est un progrès même si ça n’a rien changé à la décision prise par les responsables du Club.

Vous avez aussi été chargée de mission nationale sur les ABCD de l’égalité ?

J’ai effectivement participé au programme ABCD de l'égalité en 2013,  lancé par Najat Vallaud-Belkacem, alors ministre des Droits des femmes. Cette expérimentation était très prometteuse, toutes les académies voulaient participer. Il s’agissait de mettre en place un plan d'action pour favoriser l'égalité entre les filles et les garçons à l'école, comprenant notamment une formation des enseignants. Si vous ne changez pas les adultes, vous ne changez pas les enfants. La formation était obligatoire pour les recteurs, les enseignants, on se permettait de les interpeler en tant que personnes, pour qu’ils prennent conscience de ces stéréotypes tellement intégrés sur le rôle des femmes et des hommes.  Cette expérimentation a hélas tourné court au bout d’un an, à cause d’une minorité qui avait décrété que ce programme relevait des théories du genre et encourageait l’homosexualité. Certains détracteurs ont certes été condamnés pour diffamation, mais cela a porté un coup fatal à cette expérimentation. Cela montre bien que même si on a comme seul objectif de défendre des valeurs d’égalité, de libérer le potentiel des enfants dans les écoles de la république, on peut se heurter à des oppositions très fortes qui ont raison de la volonté politique. D’où l’importance de l’engagement de la société civile sur ces sujets sensibles. Pour continuer à porter ces sujets, jusqu’à ce que les pouvoirs publics prennent le relais.

Quel rôle jouent les acteurs philanthropiques sur ce sujet qui vous est cher ?

La philanthropie, ce sont des valeurs, des personnes qui s’engagent, qui créent des fondations et qui mobilisent des moyens pour ces valeurs. J’ai eu la chance d’être soutenue par plusieurs fondations, comme la Fondation de France, mais aussi la Fondation Volt abritée à la Fondation de France. Pour moi, la philanthropie a plusieurs visages : il y a la philanthropie de l’urgence, qui se mobilise en cas de catastrophe naturelle par exemple, la philanthropie de l’efficacité immédiate qui contribue à aider les personnes qui en ont besoin. Et il y a celle de la mobilisation. C’est celle dont j’ai besoin, celle qui n’attend pas de résultats immédiats, qui est porteuse d’une vision de la société et qui agit sur le temps long. Faire évoluer les mentalités, sensibiliser, déconstruire des stéréotypes est un combat de plusieurs générations. C’est cette relation de confiance, sur la durée, qui peut permettre à un projet comme le mien d’exister.

Qu’est-ce qui va faire courir Nicole Abar dans les prochains mois ?

Les projets ne manquent pas. Pour les deux mois qui viennent, le menu est déjà bien chargé : je suis bénévole aux Jeux Olympiques, notamment à Marseille durant le tournoi de foot. Je vais aussi participer au Marathon pour tous, organisé à Paris à 23h le 10 août, un beau symbole de mobilisation de tous les publics. J’ai adoré l’idée d’une cérémonie d’ouverture gratuite, accessible à tous. Et je serai bien sûr aussi bénévole aux Jeux Paralympiques, pour encadrer le Cécifoot qui aura lieu à la Tour Eiffel fin août.

Ma dernière énergie dans la bataille, c’est la réalisation du troisième volet de ma trilogie : Courir comme une fille. Il nous plonge dans une école maternelle, au lycée, il donne aussi la parole à des femmes adultes et fait à nouveau ce terrible constat : tout au long de leur vie, de nombreuses femmes restent marquées par l’absence de motricité, de prise de risque, de construction de l’estime de soi, qui leur a été imposée dès leur plus jeune âge. Mercedes Erra m’a rejointe sur ce projet, et j’en suis très heureuse, car sa participation va aider à donner au sujet la résonnance qu’il mérite. Je l’espère en tout cas de tout mon cœur. Avec ce dernier documentaire, je veux être une passerelle, je veux toucher le grand public.

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→ Développer la philanthropie

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