Accéder au contenu principal
Vous êtes fondateur
Vous êtes donateur
Vous êtes porteur de projet
Vous êtes fondateur
Vous êtes donateur
Vous êtes porteur de projet

Pour un numérique solidaire, responsable et durable, le rôle clé de la philanthropie

12 décembre 2024

Alors que les révolutions technologiques bouleversent radicalement nos sociétés, la philanthropie s’attache à promouvoir un numérique qui renforce l’inclusion et la justice sociale, le respect des droits fondamentaux et la démocratie. Le point autour de grands axes de son engagement.

Nous le savons tous mais le rappel provoque toujours un certain vertige. Aujourd’hui, le numérique est au cœur de nos vies et s’impose comme l’un des moteurs majeurs de transformation de nos sociétés. Pour le meilleur et parfois pour le pire, comme en témoignent les problématiques de cyberharcèlement ou de désinformation qui mettent en danger nos démocraties.

Comment permettre à tous de faire usage du numérique en se protégeant de ses dangers ? Les acteurs de la philanthropie ne pouvaient que se saisir de ce sujet majeur, multiforme et omniprésent.

Un défi dans lequel la philanthropie a toute sa place, confirme Philippe Lemoine, président de la Fondation Forum d’Action Modernités  : « la philanthropie contribue à cristalliser les actions autour du numérique en aidant les uns et les autres à nouer les alliances, en favorisant des coalitions au niveau international. Elle joue un rôle de garant en travaillant à la mise en place de critères d’évaluation objectifs des actions. Enfin, elle est essentielle pour prendre de la hauteur car le numérique est avant tout le miroir amplificateur d’une nouvelle forme de société. Tout ceci impose des débats de fond pour soutenir, et penser, les actions. »

Encourager un usage responsable du numérique 

Pour faciliter l’appropriation par tous des nouvelles technologies, il est indispensable de donner les clés d’un usage éclairé, responsable et autonome des ressources numériques. Pensée sur le temps long, cette ambition passe naturellement par la sensibilisation des jeunes générations. La philanthropie l’a bien compris, et encourage de multiples actions à leur attention.

Les Fondations Caritas, Carasso ou Araok soutiennent par exemple l’association Ecolhuma , née en 2012 avec la conviction que les enseignants sont la meilleure chance de réussite pour les enfants. L’association propose un accompagnement en ligne qui leur permet de développer une culture et un usage du numérique qu’ils puissent transmettre à leurs élèves. Le tout avec un impact très important puisque sa plateforme être PROF compte 110 000 professeurs inscrits et touche 3 800 000 jeunes. Celle-ci rassemble des propositions d’ateliers numérique à utiliser avec les élèves et donne aux enseignants des informations clé pour aborder avec eux les sujets de cyberharcèlement ou de désinformation.

Ce sujet de la désinformation est essentiel dans toutes les actions de formation et de sensibilisation. Les Fondations 15 Saints-Pères, Afnic ou du groupe EDF accompagnent des projets permettant aux jeunes de vérifier et confronter les informations. Elles soutiennent par exemple l’association Entre les lignes - créée en 2010 par Sandra Laffont, journaliste de l’AFP - qui sensibilise collégiens et lycéens à l’importance des sources d’information. « L’attentat contre Charlie Hebdo a créé un choc durable dans l’esprit des journalistes, se souvient Sandra Laffont. Depuis, beaucoup ont envie de transmettre leurs valeurs, celles de la liberté de la presse et de la liberté d’expression. Former des lecteurs, téléspectateurs, internautes exigeants s’est imposé comme une nécessité ». Avec 270 journalistes bénévoles de l’AFP et du groupe Le Monde, l’association intervient dans les établissements scolaires via des ateliers consacrés au détournement des images et au pluralisme de l’information. D’autres initiatives relèvent le même défi, tel le programme Interclass , soutenu par la Fondation de France et la Fondation Bettencourt Schueller, qui lutte contre la montée des thèses complotistes, en proposant aux élèves des décryptages d’informations.

Contribuer à un numérique durable, c’est aussi la mission de la Fondation Sept ans (parce que nous allons passer sept ans de notre vie derrière notre smartphone), créée par Nicolas Binet pour informer des bienfaits et des méfaits du numérique. La Fondation soutient des associations qui interviennent dans des écoles et des entreprises pour sensibiliser aux questions d’addiction aux écrans ou encore de dégradation de la planète causée par les usages numériques (pollution liée à la fabrication et au transport des appareils numériques, consommation d’énergie pour alimenter les data centers, déchets électroniques, etc.). Créée par un cabinet d’expertise en digitalisation, la Fondation Tasmane encourage, elle aussi, un usage du numérique compatible avec l’écologie et la soutenabilité environnementale (mesurer les impacts environnementaux de la fabrication des outils numériques, sensibiliser à un bon usage des réseaux sociaux ou à la durée de vie des ordinateurs et smartphones). Également impliquée dans les questions d’inclusivité, la Fondation Tasmane soutient des projets comme celui d’Emmaüs Connect qui développe des ateliers à travers la France afin de permettre à tous d’acquérir les connaissances de base pour faire usage du numérique.

Favoriser l’accès au numérique pour tous

Jeunes non diplômés, ménages à bas revenus, personnes âgées... Aujourd’hui en France, 15 % de la population ne possède pas les compétences numériques de base ou ne se sert jamais d’internet*. Ainsi, la Fondation Afnic a fait de la lutte contre la fracture numérique l’un de ses combats majeurs. « Il est essentiel de rendre l’usage du numérique accessible aux personnes qui en sont éloignées, car c’est aujourd’hui un motif d’exclusion, explique Isabel Toutaud, sa déléguée générale. Que ce soit pour la recherche de logement, d’emploi, ou pour effectuer des démarches administratives, le monde est de plus en plus dématérialisé ».

Plus de 600 projets ont été soutenus par la Fondation Afnic depuis sa création en 2015 avec une volonté d’agir partout où cela est nécessaire. « Nous accompagnons des structures qui viennent en aide à des publics vulnérables en utilisant le numérique, ou leur en donnant l’accès quand ils ne l’ont pas. Nous soutenons par exemple l’association CLE (compter, lire, écrire) qui propose des cours d’informatique aux parents des quartiers sensibles afin qu’ils puissent suivre les progrès de leur enfant sur Pronote et s’informer sur les questions de cyber-harcèlement. Nous investissons le domaine agricole avec des ateliers à destination de professionnels en difficulté pour s’approprier les outils informatiques nécessaires à la gestion de leur exploitation. »

La Fondation de France soutient également des initiatives innovantes comme celle portée par la Fédération des centres sociaux et socioculturels de France. Son projet de recherche action « Dématérialiser sans déshumaniser » propose un accompagnement aux personnes éloignées du numérique sous forme d’ateliers animés par des professionnels du secteur. L’occasion de recueillir des témoignages pour faire évoluer les outils et les applications afin de les rendre plus accessibles.

Contribuer à un numérique plus inclusif

Un numérique pour tous passe également par un numérique par tous, et donc une juste représentation de l’ensemble de la société dans ce secteur.

Fort de cette conviction, Frédéric Bardeau a co-fondé en 2013 l’Ecole Simplon , dont les activités d’intérêt général sont soutenues par de nombreuses fondations, notamment BNP Paribas, Société Générale, et Crédit Mutuel Alliance Fédérale. « Nous formons aux métiers du numérique des jeunes sans diplôme et des personnes éloignées de l’emploi. Notre formation est gratuite et la moitié de nos apprenants ont un niveau bac ou inférieur ; 12 % sont en situation de handicap et 7 % sont des personnes migrantes ». En dix ans, l’école a formé plus de 30 000 personnes en France et dans le monde, et les mesures d’impact se révèlent très positives : 80 % des élèves décrochent un job dans les 6 mois, 91 % dans l’année qui suit.

Créée en 2018, la Fondation Femmes@numérique a choisi d’agir en faveur de la parité. Un vrai sujet dans un secteur d’activité où l’on compte moins de 23 % de femmes. « La France se doit d’être compétitive sur les sujets liés aux nouvelles technologies, or nous manquons aujourd’hui de ressources humaines dans ce secteur. Alors, pourquoi se priver de 50 % des talents et empêcher les femmes d’accéder à des emplois stables et rémunérateurs ? Par ailleurs, si elles ne sont pas présentes dans les métiers qui conçoivent les produits numériques, on constate des biais d’usage (invisibilisation des femmes, reproduction des stéréotypes de genre, etc.). Dans les domaines de la justice, de l’éducation, de l’accès à l’emploi ou au crédit, les professionnelles en charge du numérique sont là aussi pour prévenir toute iniquité et défendre les grandes causes des femmes ». La Fondation Femmes@numérique soutient ainsi des initiatives qui luttent contre les stéréotypes dès le primaire, et développent l’attractivité des formations numériques dans le secondaire. En outre, elle organise depuis 2023 les Assises nationales de la féminisation des métiers et filières du numérique afin de réunir les différents acteurs, avec l’objectif de parvenir à la parité dès 2030.

Construire un numérique qui renforce et préserve la démocratie

Le numérique par tous et pour tous constitue un outil démocratique puissant, donnant aux populations de nouveaux moyens et espaces d’expression, de mobilisation et de participation. Il est aussi un outil de déstabilisation de nos sociétés, contribuant à la polarisation des débats et à la transmission de fausses informations, en contradiction avec la tenue d’un débat éclairé. Ce constat est la matrice de l’une des réflexions majeures menée par l’Observatoire Philanthropie & Société de la Fondation de France dans le premier numéro de sa nouvelle collection « Les Carnets de l’Observatoire » dédié au thème numérique & démocratie. 

« A la Fondation de France, nous sommes convaincus que la philanthropie peut contribuer au développement d’un numérique qui favorise une activité démocratique riche et apaisée. Il s’agit par exemple de soutenir des solutions dont les modèles économiques ne reposent ni sur la captation de l’attention ni sur celle de la donnée des usagers, ou de limiter la circulation de fausses informations en développant des modalités de détection et de signalement auprès des instances de régulation. Ou encore de lutter contre les diverses formes de cyberviolences en améliorant l’identification et le signalement des agresseurs, en développant la prévention et la prise en charge des victimes, en créant des espaces d’expression protégés… Il y a beaucoup à faire dans un contexte d’accélération des mutations numériques. C’est pourquoi nous privilégions l’action collective, avec la création d’un collectif d’action dédié à ces sujets pour avoir un véritable impact », souligne Constance Garnier, responsable Grande cause Numérique à la Fondation de France.  

Au niveau européen, plusieurs fondations encouragent des initiatives permettant à la société civile de s’engager pour le respect de la démocratie. Née en 2018, la coalition Civitates réunit 23 fondations décidées à mettre en commun leur expertise sur les questions liées au rétrécissement de l’espace dédié à la société civile en Europe, expliquent Samuel Sigere et Claudio Cesarano, Programme managers. « Civitates a créé un pôle tech & démocratie et soutient les associations qui travaillent, dans les différents pays, au respect des réglementations européennes sur les services numériques, l’intelligence artificielle ou la publicité en ligne. Elle finance plusieurs types d’actions, notamment des études autour de l’impact des technologies sur le discours public, ou la tenue d’élections. Elle accompagne également des actions de plaidoyer auprès des instances gouvernementales chargées d’implémenter ces réglementations. Par ailleurs, la coalition a créé le pôle médias qui soutient des publications indépendantes, et la liberté d’information ».

Dans le même esprit, la Fondation Luminate défend les droits humains face aux technologies numériques. Elle accompagne des actions d’encadrement, notamment des GAFAM, pour contrer les dérives potentielles de leur modèle, par exemple la façon dont les algorithmes et l'intelligence artificielle peuvent nuire aux écosystèmes d’information et, par extension, aux démocraties. « Nous soutenons des ONG comme Global Witness qui a révélé comment Tik Tok, Youtube et Facebook ont accepté des publicités contentant de la désinformation nuisible aux élections, à quelques jours du vote aux Etats Unis, nous apprend Elise Tilllet, responsable plaidoyer et médias. Ou encore des ONG comme Al Forensics qui a dévoilé comment Meta laisse la propagande russe inonder ses plateformes avec de la désinformation ».

Les fondations encouragent également les actions de plaidoyer. Vox Public intervient pour aider les associations à renforcer leur capacité d’interpellation, notamment grâce à l’utilisation des outils numériques. La Fondation Luminate finance le réseau paneuropéen « People vs Big Tech  » qui rassemble plus de 100 organisations engagées pour la justice numérique. Leurs efforts de plaidoyer ont joué un rôle majeur dans l’adoption du Digital Services Act (DSA) de l’Union Européenne, qui réunit des mesures phares telles que l’interdiction de l’utilisation de la publicité ciblée pour les mineurs et des exigences de transparence strictes pour les grandes plateformes.

* chiffres publiés par l’Observatoire des Inégalités - mars 2024

 


Pour en savoir plus 

→ Carnet de l'Observatoire Philanthropie & Société : le numérique au service de la démocratie