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Jeunes et climat : comment la philanthropie soutient la mobilisation des jeunes générations

7 juillet 2023

Si le dérèglement climatique est une préoccupation majeure de nos sociétés, elle l’est encore plus pour les jeunes générations. Mais entre fatalisme, éco-anxiété ou tentation radicale, comment transformer le sentiment d’urgence en action concrète et durable ? Face à cette envie de transformer le monde pour mieux habiter la planète, la philanthropie se mobilise aux côtés des jeunes pour encourager leurs initiatives, renforcer leur pouvoir d’agir et construire un avenir durable.

Toutes les études sont unanimes. Le changement climatique est LE sujet de préoccupation numéro un de nos sociétés, particulièrement celui des jeunes générations. Selon un récent sondage* mené par l’Ifop pour la Fondation de France, 9 jeunes sur 10 (âgés de 18 à 25 ans) s’avouent inquiets des effets du réchauffement climatique -malaise qui se traduit par une éco-anxiété grandissante, considérée par certains comme le nouveau mal du siècle. « Le terme est né dans les années 70, et s’est généralisé dans les années 2000 pour devenir omniprésent aujourd’hui, précise Laura Bullon-Cassis, chercheuse à l’école des Hautes-études internationales et de développement. Il a le mérite de traduire cette peur du futur qui envahit notamment les plus jeunes mais il n’est pas sans danger. Il induit en effet une pathologisation qui peut entraîner une forme d’apathie (le futur est effrayant et tout est déjà perdu) ou alors une colère capable de conduire à une radicalisation ». Comme beaucoup de chercheurs, Laura Bullon-Cassis préfère à la notion d’éco-anxiété celle d’éco-lucidité, dans la mesure où elle bannit l’aspect pathologique et fait de cette inquiétude une réaction saine et même nécessaire pour passer à l’action. 

Agir pour ne pas subir

L’action comme seule solution… C’est aussi la conviction de 81 % des 18-25 ans interrogés qui estiment que leur génération a le pouvoir d’agir, même si beaucoup cherchent des façons neuves de s’engager. « On assiste à une défiance de plus en plus importante vis-à-vis des pouvoirs publics, explique Sébastien Galy, directeur des actions nationales et internationales de la Fondation pour la Nature et l’Homme. Une majorité de jeunes admet encore ne pas savoir où, et comment agir. » Dans ce contexte, la philanthropie a plus que jamais un rôle à jouer, explique Laetitia Bertholet, responsable du département Transition écologique et solidaire à la Fondation de France. « L’ambition est de donner aux jeunes le pouvoir d’agir via de multiples leviers. Favoriser de nouvelles formes de sensibilisation, encourager les actions et leur structuration, accompagner la co-construction et la formation des décideurs de demain. »

Reconstruire le lien au vivant

« Si la pédagogie reste l’un des axes majeurs de l’action philanthropique, son rôle n’est plus le même, assure Sébastien Galy. La question majeure n’est plus la prise de conscience mais la compréhension des enjeux, notamment en termes d’adaptation au changement climatique. Enfin, la méthode doit, elle aussi, changer ; passer d’une approche intellectuelle à une approche expérientielle car cette génération a besoin de vivre les choses. » 

Et l’expérience commence dès le plus jeune âge, via des programmes qui favorisent les liens des tout-petits avec le vivant. C’est l’objectif de l’appel à communs « Grandir en lien avec la nature », porté par huit fondations (la Fondation de France, Famille Lemarchand, Iris, Léa Nature/Jardin Bio, Nature et Découvertes, Terra Symbiosis, Une Goutte d’eau pour la planète et le 1 % pour la planète) qui soutiennent une trentaine de structures chaque année ; par exemple l’association Graine de Pays de Loire qui accompagne le développement de l’École du dehors ou la Cité de l’agriculture à Marseille qui organise des ateliers pour reconnecter les plus petits au cycle du vivant, dans une ville minérale dépourvue d’espaces verts...

« Grâce à des actions de ce type, l’engagement des jeunes est en croissance significative explique Laetitia Bertholet, mais il reste très différent selon le milieu social ». Voilà pourquoi des associations se tournent de plus en plus vers les territoires isolés et les banlieues, notamment les programmes Jeunesse de Génération Climat (soutenue par la Fondation pour la Nature et l’Homme) ou encore les actions de l’association Banlieues Climat (Fondation Terre Solidaire). Cette dernière œuvre pour que les quartiers populaires ne soient plus l’angle mort de l’écologie, et propose aux jeunes des formations pour animer eux-mêmes des ateliers de sensibilisation dans les écoles primaires. Une pédagogie fondée sur l’expérience est également au centre des actions menées par le réseau « J’agis pour la nature ». Il réunit 1200 structures (associations, collectivités...) et propose une centaine d’activités sur tous les territoires, avec un seul objectif : protéger la biodiversité en s’amusant et en apprenant. 

Encourager et structurer les actions

Penser la pédagogie par l’action a aussi pour effet d’inciter les jeunes à imaginer leurs propres projets. Le programme Génération Climat, créé en 2016 par la Fondation pour la Nature et l’Homme, propose un dispositif de financement spécifique. « Grâce au projet Coup de pouce, nous accompagnons les premières initiatives avec une enveloppe de 2000 euros. Avec Coup de main, nous les pérennisons en offrant une aide de 5000 euros, explique Sébastien Galy. Ces financements nous ont permis d’augmenter de façon significative le nombre de projets présentés. » Dans le même esprit, la Fondation SingularPlanet, abritée par la Fondation de France, alloue à des jeunes, de 18 à 29 ans, une bourse de 1000 à 5000 euros pour la réalisation de leur projet en faveur de la transition écologique, ce dernier devant être validé par un établissement d’études supérieures. Quant au concours Déclic jeunes, il propose chaque année des aides financières pour soutenir les initiatives des 18 et 29 ans. Chaque lauréat reçoit entre 3000 et 8000 euros pour concrétiser son projet et bénéficie d’un soutien méthodologique, via des partenaires comme l’Institut de l’Engagement ou Live for Good.

Pour aller plus loin dans l’essaimage des actions mais aussi la réflexion, des structures comme l’Académie du climat, imaginée en 2021 par la Ville de Paris, se mobilisent pour fédérer les initiatives. Pour Laura Bullon-Cassis, « cette structure est assez emblématique car très complète. Elle permet aux jeunes d’expérimenter des solutions durables au sein d’ateliers proposés dans les établissements scolaires. Elle s’inscrit aussi dans une démarche de transmission des savoirs, faisant le lien entre connaissances théoriques et applications pratiques via des conférences, des événements organisés le soir et le week-end. Façon de rassembler ceux et celles déjà engagés dans la transition écologique, de replacer les expériences menées dans les grands axes de la lutte contre les changements climatiques ». 

Faire de l’environnement une cause commune 

Intégrer la question climatique dans une problématique plus vaste, c’est la mission du Pacte pour le Pouvoir de Vivre lancé en 2019 par 19 organisations environnementales, de solidarité et d’éducation. Leur credo : relier préoccupations sociales et environnementales. Rassemblant aujourd’hui plus de 60 membres, la structure agit dans les territoires, mixant les générations pour co-construire des actions avec une conviction : face aux multiples défis de ce nouveau siècle, la solution impose d’allier écologie, justice sociale et démocratie. 

Penser la justice climatique est aussi l’objectif de Génération Lumière, une association créée en 2017 par David Kithoko, pour conjuguer écologie et solidarité internationale. « Je suis arrivé en France en 2013 à l’âge de 15 ans, après avoir vécu avec ma famille en République Démocratique du Congo, près du lac Tanganyika qui nous faisait vivre, avant d’être asséché et menacé de disparition. J’ai ensuite vécu dans un HLM de la banlieue de Lyon au-dessus d’une autoroute, subissant le bruit et la pollution, j’ai alors compris qu’il existait une convergence des problèmes. Au Congo comme en France, les plus pauvres sont les plus concernés par les défis environnementaux, alors qu’ils en sont les moins responsables. J’ai donc décidé de créer Génération Lumière, présente dans les deux pays. En France, nous organisons des débats autour de la justice climatique. Au Congo, nous menons des actions concrètes -plantation d’arbres, fabrication de poubelles publiques, mettant un coup de projecteur sur l’inaction des institutions locales en tentant de pallier les insuffisances. Une façon de lutter aussi contre une forme de fatalisation, pour que les gens ne restent pas impuissants face à l’indifférence des décideurs. »

Former les décideurs de demain…

Comme en témoigne David Kithoko, relever ces défis impose d’imaginer de nouveaux modèles, d’autres façons de produire, de consommer et de gérer les ressources existantes. C’est pourquoi un collectif d'enseignants chercheurs, d’entrepreneurs et d’étudiants ont décidé en 2018 de créer en France, un lieu académique qui rassemble tous les savoirs et concepts émergents sur ces questions. L’objectif du Campus de la Transition ?  Former pour transformer l’Enseignement supérieur et les responsables d’aujourd’hui et de demain, en vue d’une transition écologique et solidaire. Dans le même esprit, l’Académie des futurs leaders, fondée en 2020 par Alice Barbe et Michka Bengio, multiplie les programmes de formation pour des personnes engagées dans des causes de justice environnementale et sociale, désireuses d’incarner une nouvelle génération politique. Une façon d’agir et de penser le monde de demain, loin de tout fatalisme. 


*sondage Ifop Fondation de France, novembre 2022