Pourquoi la participation est-elle indispensable ?
La participation, un effet de mode ? Bien au contraire, elle est une condition de succès et un passage obligé pour réussir les démarches de transformation sociale. Pourquoi, comment ? Les regards croisés de Denys Cordonnier, Claire Boulanger et Karine Pouchain-Grépinet.
Denys Cordonnier, président du Comité démarches participatives : « Face aux enjeux actuels, l’expérience des "oubliés" représente un capital irremplaçable ! »
« La première raison d’être de la participation, c’est tout simplement l’efficacité ! Pour d'une part concevoir de nouvelles solutions. Qu’il s’agisse de transition écologique, de protection sociale, d’emploi, d’éducation ou de grand âge… les questions que nous avons collectivement à résoudre sont trop complexes pour être uniquement traitées par les experts. Il y a un savoir de ceux qui vivent la mise en échec, la marginalisation. Par exemple, sur le décrochage scolaire : le vécu des parents et des enfants en difficulté constituerait une source unique de réflexion et d’expérimentation… mais leur pensée n’est quasiment jamais sollicitée ! Au mieux, le point de vue des personnes en difficulté est convoqué au titre du témoignage, pour « nourrir » la réflexion des professionnels ! Or pour être productives, les démarches participatives doivent permettre à tous ceux que l’on réduit au rôle de témoin, de se constituer en pôle de savoir et de proposition, étayé par l’expérience.
Ensuite, pour mettre en œuvre ces nouvelles solutions : les transformations majeures qui sont devant nous ne seront acceptables et applicables que si elles ont été pensées collectivement. A l’inverse, les innovations imposées « d’en haut » sont finalement inadaptées voire même contre-productives ! En ce sens, la participation, c’est avant tout une responsabilité partagée de co-construction.»
Claire Boulanger, expert solidarités nationales : « Sans participation, la démocratie représentative s’asphyxie »
« Partout dans la société, il y a une aspiration de plus en plus partagée à donner son avis, à apporter sa pierre à l’édifice social. Cette demande de participation, croissante dans tous les domaines, peut être lue sous un double éclairage. On peut y voir le signe d’un affaiblissement des institutions, des relais, de tout ce qui faisait « courroie de transmission ». Elle est sans doute aussi une réaction à la fragmentation de notre société : face à un corps social qui se « détricote », nous avons besoin de méthodes, de dispositifs, de volontarisme…pour recréer du lien, du collectif. Mais cette demande est aussi un formidable signe de vitalité démocratique, presqu’un retour aux sources ! La démocratie ne peut pas être un simple geste de délégation, un chèque en blanc signé pour un temps donné. Elle a besoin d’oxygène, entre deux élections, et les démarches participatives -à conditions qu’elles soient sincères et non manipulatrices- assurent cette respiration. Apprenons collectivement à les organiser ! »
Karine Pouchain, responsable du programme Maladies psychiques : « La vraie valeur de la participation, c'est la mixité »
« On entend parfois par démarche participative le fait de consulter des bénéficiaires de services sociaux. Or un processus participatif doit bénéficier à tous. Nous l’avons vu en organisant les Ateliers Parlons Psy , qui ont réuni partout en France des familles et personnes concernées par des troubles psychiques, des soignants, des professionnels de l’accompagnement, des acteurs institutionnels… Les enjeux de santé mentale sont trop complexes pour être traités par un seul point de vue ! Ceux qui sont généralement considérés comme « bénéficiaires » du système de santé voient progressivement leur expérience reconnue et leurs idées prises en compte. Mais cette parole libérée fait aussi progresser ceux qui se définissent comme « sachants » et professionnels ! La participation ne fonctionne durablement que si elle profite à tous. Sa vraie valeur tient dans la mixité. »
14 Novembre Montreuil
Voix d’avenir : une journée pour expérimenter, débattre… et grandir en participation
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