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Dans la famille de l’Économie Sociale et Solidaire, je recommande les fondations, par Béatrice Bausse

Points de vue sud-ouest| 28 Fév.2022

vignette beatrice beausseLes fondations restent des structures méconnues du grand public et étonnamment d’une partie des acteurs de l’Economie Sociale et Solidaire dont elles font, depuis la loi dédiée à ce sujet en 2014, officiellement partie.

La loi du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat définit la fondation comme « l’acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales décident de l’affectation irrévocable de biens, droits ou ressources à la réalisation d’une œuvre d’intérêt général et à but non lucratif ». Depuis 1987, plusieurs textes ont modifié le régime et les statuts des fondations.

Le système français des fondations a longtemps été marqué par quatre caractéristiques :

  • Le caractère définitif des libéralités, défini par la loi de 1987 ;
  • Le lien avec la puissance publique, par le biais du contrôle en amont des créations de fondations par les pouvoirs publics (auquel le fonds de dotation fait exception) ;
  • La pérennité de leur action, initialement traduite par l’obligation de pérennité des dotations ;
  • La gouvernance, via un conseil d’administration restreint.

Ces caractéristiques techniques reflètent le caractère irrévocable du don (donner c’est donner), la rigueur de la gestion, la pérennité nécessaire pour l’accomplissement des actions... Ce qui en fait un véhicule solide, durable et, nous le verrons, réactif et agile.

D’après l’Observatoire de la philanthropie de la Fondation de France, environ 2600 fondations sont actives en France. Plus d’un tiers d’entre elles a été créé ces dix dernières années. Autant dire que ce secteur, acteur et financeur de l’Économie Sociale et Solidaire, est vivant et très actuel. Par ailleurs, les fondations engagent chaque année en France plus de 10 milliards d’euros au service de l’intérêt général.

Cependant, en comparaison d’autres pays européens, le développement des fondations en France est relativement faible et tardif.

On peut distinguer au moins trois raisons qui ont concouru à entraver l’émergence des fondations dans notre pays :

  • Historiquement, la forte emprise de l’État sur l’intérêt général s’est doublée d’une crainte de voir se développer une concurrence privée, capable à travers l’accumulation de richesses, de constituer un réel contre-pouvoir.
  • La deuxième explication du modeste nombre des fondations françaises est le formidable succès, dans notre pays, du contrat d’association. Consacrée par la fameuse loi de 1901, l’association a connu un développement considérable grâce à son régime de liberté, qui lui permet de s’affranchir de moyens financiers, et donc d’autorisation pour voir le jour. Pour comparaison, tandis que 4 000 fonds et fondations seulement ont émergé d’une tradition multiséculaire, une centaine d’années a suffi pour créer 1,5 million d’associations.
  • Dernière raison enfin, moins souvent évoquée, et pourtant cruciale pour expliquer le modeste développement des fondations : la protection légale des héritiers par la réserve successorale. Cette disposition prévoit que les descendants recueillent automatiquement une fraction de la fortune du défunt. Des héritiers directs s’estimant lésés par d’importantes libéralités faites par le défunt de son vivant sont fondés à réclamer, jusqu’à dix ans après son décès, que leur droit proportionnel soit à nouveau calculé. La réforme des successions de 2006 ouvre néanmoins la possibilité de procéder à des « pactes sur succession future » : les héritiers réservataires renoncent ainsi par avance à exercer leur droit de recours, notamment au profit d’une fondation.

Il existe en France huit dispositifs de fonds et fondations. Établis à différentes périodes, ces dispositifs correspondent formellement à six statuts juridiques et à deux dispositifs abrités :

Quatre dispositifs généralistes :

- Fondation reconnue d’utilité publique (FRUP)
- Fondation abritée (FA), sous l’égide d’une FRUP
- Fondation d’entreprise
- Fonds de dotation (FDD)

Quatre dispositifs spécialisés :

  • Fondation de coopération scientifique Fondation partenariale
  • Fondation universitaire (FU), sous l’égide d’un établissement d’enseignement supérieur et de recherche
  • Fondation hospitalière

Sans rentrer dans le détail de ces huit dispositifs, leur analyse conduit aux observations suivantes :

  • Le régime fiscal applicable aux mécènes (particuliers ou entreprises) et aux structures elles-mêmes est quasi-identique pour toutes ces organisations, alors qu’elles ne présentent pas toutes les mêmes garanties de solidité et de qualité ;
  • L’éclatement de l’autorité administrative des fondations entre différents ministères et administrations locales complexifie la lisibilité du paysage ;
  • Les quatre dispositifs sectoriels sont très peu utilisés : fondations de coopération scientifique, fondations universitaires et fondations partenariales regroupent au total moins de 100 fondations, et il n’existe à ce jour que deux fondations hospitalières.

Au-delà des différents statuts et dispositifs, la façon d’opérer des fondations est extrêmement structurante pour analyser les grandes lignes de force du secteur. En effet, les fondations françaises peuvent fonctionner selon deux modes opératoires, certaines pouvant fonctionner en combinant ces modes :

Les fondations distributives, ou bailleurs, ou de financement se consacrent au financement et à l’accompagnement de projets, qui leur sont extérieurs, par la distribution de subventions à des associations, des institutions ou groupes, et de bourses ou de prix à des personnes physiques (chercheurs, étudiants…) et à l’accompagnement de ces projets par le soutien au renforcement des compétences, la mise en réseau, l’évaluation, la valorisation et la capitalisation. Ce modèle est né en France dans la deuxième moitié du XXe siècle, à la manière de la philanthropie américaine du type « grant-making », et c’est avec le développement des fondations d’entreprise à partir des années 1990 que ce modèle s’est généralisé. Ces fondations distributives sont davantage productrices que simplement financeuses : elles choisissent les projets qu’elles soutiennent et accompagnent leur développement.

Les fondations opératrices mettent en œuvre, elles-mêmes, en direct des activités via des équipes salariées (gestion d’un musée, d’une maison de retraite, d’un hôpital, etc.). Il s’agit d’un modèle plus ancien, hérité du XIXe siècle.

Alors que les fondations opératrices étaient majoritaires jusque dans les années 60, l’inflexion vers le modèle distributif s’est opéré à partir des années 70. La création en 1969 de la Fondation de France, qui commence, dès cette période, à accueillir sous son égide des fondations abritées distributives, explique largement cette évolution. Cette tendance continue de s’accentuer puisque depuis 2010, neuf nouvelles fondations sur dix sont créées sur ce modèle. Aujourd’hui, plus de 80% des fondations sont distributives.

Plus les fondations sont récentes, plus elles sont susceptibles d’avoir une entreprise parmi leurs fondateurs. Plus de 25 ans après la loi qui a institué les fondations d’entreprise, presque toutes les grandes entreprises ont organisé leurs activités de mécénat.

Les nouvelles fondations sont plutôt le fait d’entreprises de taille intermédiaire (ETI), petites et moyennes entreprises (PME) et très petites entreprises (TPE) souhaitant s’engager à l’échelle territoriale. Elles créent leurs fondations parfois aux côtés de leurs fondateurs ou actionnaire unique ou majoritaire, souvent sous la forme de fondations abritées, ce statut permettant à ces petites structures de se décharger de l’ensemble des tâches administratives, et de s’appuyer sur l’expertise thématique et/ou territoriale d’une fondation abritante.

Les deux dernières décennies ont vu croître la proportion de projets de fondations de nature collective : il peut s’agir de plusieurs entreprises de taille moyenne qui rassemblent leurs forces pour développer un projet de mécénat territorial, ou encore d’un groupe d’amis ou de membres d’une famille nombreuse qui unissent leurs ressources pour agir ensemble sur une cause de leur choix. Cette montée en puissance du collectif témoigne d’une certaine maturation de la philanthropie française, dans la mesure où la conjonction de moyens et de compétences divers permet souvent d’avoir une action plus significative.

Les fondations se concentrent en priorité sur l’action sociale qui est le domaine d’intervention mobilisant le plus grand nombre de fondations puisque près d’un quart d’entre elles choisissent d’agir dans ce domaine. Les arts et la culture ainsi que la santé sont également des domaines d’action prioritaires des fondations avec respectivement 17% et 18% agissant dans ces domaines.

Enfin, les fondations s’adressent en premier lieu à tous les publics, elles ciblent également prioritairement les enfants et les jeunes (37 %).

Si ces deux populations se placent largement devant les autres publics, les fondations portent néanmoins une attention importante à d’autres populations spécifiques. Plus d’une fondation sur sept s’adresse aux personnes en difficulté économique, ordre de grandeur similaire pour les personnes malades et pour les personnes en situation de handicap.

Reste un aspect important que la crise sanitaire a révélé plus largement : la question du territoire d’intervention ; plus d’un tiers des fondations françaises agit à l’échelle nationale et près de la moitié au niveau local. La dimension territoriale est devenue prioritaire dans l’action des fondations françaises. Il est donc justifié de les considérer comme des acteurs de proximité, au plus près des problématiques que rencontrent les citoyens.

Cela explique l’apparition des fondations territoriales depuis une dizaine d’années. Inspirées du modèle anglo-saxon des fondations communautaires (community foundations), les fondations territoriales présentent plusieurs caractéristiques :

- Un territoire : une zone d’intervention géographique délimitée : à l’échelle d’une commune, d’une ou plusieurs agglomérations, d’un département, d’une région ou encore d’un parc régional.
- Une réponse transversale aux besoins locaux : des domaines d’intervention multiples, en lien direct avec les besoins les plus prégnants du territoire.
- Un collectif : une gouvernance collégiale, fondée sur une expertise locale. Les fonds sont apportés conjointement par les différentes entreprises et/ou personnes fondatrices. Chacune s’engage à la hauteur de ses capacités et ressources.

Même si les fondations territoriales restent encore mal identifiées, ne correspondant pas à un statut juridique spécifique, elles représentent un phénomène émergent, et constituent un levier pour l’engagement de proximité, aux côtés des acteurs publics. Ainsi, la mobilisation de ressources privées peut permettre d’intervenir sur des sujets de niche, explorer des innovations, ou encore répondre à des besoins peu ou mal couverts sur le territoire.

La période que nous traversons depuis 2020 a accentué les fragilités de notre société et remis au premier plan les enjeux de solidarité, de justice et d’intérêt général. Pour parvenir à les atteindre, l’engagement de la société civile sous toutes ses formes, en complément de l’action publique, est indispensable.

Mais cette crise a aussi joué un rôle de révélateur, permis de prendre collectivement conscience que chacun d’entre nous a le pouvoir d’agir pour les autres. Le secteur philanthropique, les fondations en particulier, a fait montre de sa capacité à se mobiliser, à s’interroger, à s’adapter aux besoins des territoires et de ceux qui y vivent, pour agir vite et trouver des solutions. Un engagement à saluer qui confirme le soutien indéfectible qu’apportent les fondations au secteur associatif, et plus largement à la société.

Retrouvez l’ensemble des études de l’Observatoire de la philanthropie de la Fondation.

 

QUELQUES RÉFÉRENCES

Les fondations et fonds de dotation en France en 2018 - Observatoire de la philanthropie Fondation de France, 2019
Panorama national des générosités - Observatoire de la philanthropie Fondation de France, 2021 
Baromètre annuel de la philanthropie les fondations et fonds de dotation en France - Observatoire de la philanthropie Fondation de France, 2021
Tableau comparatif des fonds et fondations en France – Fidal
→  Comparative Highlights of Foundation Laws, a comprehensive overview of the legal and fiscal regulation of foundations in Europe – EFC DAFNE, 2021
→ Frumkin P. Pache A.-C. Gautier A. (2020), Vers une philanthropie stratégique, Editions Odile Jacob

AVERTISSEMENT : La Chaire TerrESS a pour ambition de nourrir les liens entre les organisations de l’ESS, la recherche, la formation et l’action publique. Elle publie des analyses et propositions sélectionnées pour leur lien thématique avec les sujets d’intérêt de la Chaire, leur qualité argumentative et leur contribution aux réflexions actuelles des acteurs et actrices de l’ESS. Elle ne reprend pas à son compte chacune d’entre elle.

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