Nicolas Krausz : « Les communs ont un rôle déterminant à jouer dans la transition écologique »
Nicolas Krausz est membre du comité Transition écologique de la Fondation de France depuis juin 2022. Responsable de programmes à la Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de l’homme, il est notamment en charge des thématiques de la transition écologique et des communs.
Pourquoi avoir choisi d’intégrer le comité Transition écologique ?
Le comité Transition écologique de la Fondation de France se trouve à un moment charnière avec la mise en place de nouvelles manières de travailler. Nous sommes en train de passer d’une logique d’appels à projet à un repérage et une sélection proactive de nos partenaires et des porteurs de projets que l’on souhaite soutenir en leur apportant une aide globale et durable, selon des axes thématiques et des objectifs stratégiques décidés par le comité. Nous faisons ainsi l’expérience d’une philanthropie plus transformatrice, exploratrice et partenariale, ce qui est très motivant !
En quoi l’approche de la Fondation de France est-elle spécifique ?
La spécificité de la Fondation de France, c’est bien sûr ses fondations régionales qui lui permettent d’être au plus près du terrain, au plus près des expérimentations et projets dans les territoires. En plus d’identifier et de répondre aux causes profondes des crises actuelles, elle agit à la racine, directement sur le « terrain » grâce à la présence des bénévoles en région faisant partie du comité Transition écologique. Nous travaillons tous ensemble sur la notion de transition juste pour encourager le rapprochement entre les problématiques écologiques et sociales et la participation citoyenne.
De plus, la Fondation de France s’attache à faire de l’accompagnement méthodologique de ses partenaires et de leur mise en réseau, une priorité. La rencontre des porteurs de projets sur les communs qui s’est déroulée en juillet dernier en est une belle illustration. La Fondation de France se situe ainsi clairement dans une démarche à la fois opérationnelle et apprenante que je trouve très inspirante pour le secteur et qui gagnerait certainement à être capitalisée.
Quelles sont les perspectives d’avenir envisagées par le programme Transition écologique suite aux Rencontres des porteurs de projets organisées les 4 et 5 juillet 2022 ?
Cette rencontre, me semble-t-il, a d’abord eu le mérite de montrer la réalité et la vitalité des communs en France. La vingtaine de porteurs de projets réunis au Jardin d’agronomie tropicale de Vincennes a permis de présenter des initiatives très concrètes relatives aux communs : gestion d’un collectif, mobilisation des usagers pour gérer une ressource commune (haie, forêt, jardin partagé), des habitants d’un quartier urbain ou d’un territoire rural, construction de tiers-lieux, de circuits courts alimentaires… Ces rencontres ont aussi permis d’identifier les nombreux points communs entre les projets, malgré leur diversité géographique et thématique. La rencontre a aussi confirmé les besoins et attentes en matière d’accompagnement méthodologique, juridique, stratégique. Nous avons proposé des groupes de travail, de soutien et d’échanges entre pairs, et imaginé des outils et des espaces de mutualisation, etc. J’ai l’impression qu’une communauté est née lors de ces rencontres. A nous, à la Fondation de France, de faire en sorte qu’elle perdure malgré les urgences du quotidien et les priorités de chacun !
Vous travaillez depuis 10 ans sur cette thématique. Selon vous, comment les communs peuvent amplifier la transition écologique ?
Les communs ont très clairement un rôle déterminant à jouer dans la transition écologique, aussi bien en matière de bonnes pratiques que de bonnes politiques.
Depuis 10 ans, nous avons constaté que les communs représentent, sous certaines conditions, une solution de gestion à la fois écologiquement durable et socialement juste. Mais les bonnes politiques permettant un changement d’échelle des communs sont encore à imaginer, diffuser et mettre en œuvre. L’invention de nouvelles formes de règles juridiques permettant une gestion plus collective du foncier et des ressources en est un chantier. Tout comme la mise en place de partenariats publics-communs avec les collectivités territoriales. L’enjeu devant nous consiste à articuler micro et macro, les milliers de communs territoriaux et un régime de légalité qui les protège et les encourage. Cela passe par la promotion de l’action citoyenne, aussi bien aux côtés de l’État que des acteurs économiques. Faisons donc des communs un projet citoyen désirable et à essaimer le plus largement possible.