Une ferme expérimentale dans le pays avignonnais
Planter aujourd'hui le bio de demain
À la ferme de La Durette, dans le pays avignonnais, agriculteurs et scientifiques travaillent main dans la main pour inventer l’agriculture de demain. Après plusieurs années de co-conception, place à la mise en pratique. Si les agronomes savent désormais que le fait d’associer fruits, légumes et élevage sur la même parcelle permet de réduire l’usage de pesticides, l’équipe de La Durette teste avec des agriculteurs différents scénarios, plante, déplace, installe et quantifie les résultats. L’objectif est de trouver le meilleur modèle économique pour le rendre reproductible. Ce projet, qui s’inscrit de facto dans un temps long, de l’ordre d’une génération, est soutenu depuis l’origine par la Fondation de France et la Fondation Daniel et Nina Carasso qu’elle abrite.
Rencontre avec Julien Ronzon
Julien Ronzon est ancien chef de projet du GRAB, premier agriculteur sur le site de La Durette.
Comment est né le projet de La Durette ?
En 2010, c’est le GRAB (groupe de recherche en agriculture biologique) qui commence à initier une réflexion sur ce que pourrait être l’agriculture bio dans 30 ans. Parmi ses membres, André Sieffert, postdoctorant à l’INRA (institut national de la recherche agronomique), avait un projet de recherche en agroforesterie, soutenu par la Fondation de France. C’est ainsi que la ferme pilote de La Durette a été lancée, pour explorer de nouvelles techniques agricoles associant des arbres à des cultures annuelles comme le maraîchage et le pâturage. J’ai rejoint le projet pour mettre en oeuvre toutes les bonnes pratiques identifiées de façon théorique, faire les choix techniques, planter les arbres fruitiers, installer le matériel d’irrigation… Ça a été un véritable travail collectif entre de nombreux partenaires associatifs et publics.
Comment va évoluer le projet dans les prochaines années ?
À court terme, l’idée est de mettre la ferme en gérance avec des agriculteurs pour passer d’un projet pilote à un système pérenne. Les producteurs intéressés bénéficient d’un site « clé en main » avec des arbres fruitiers, du matériel et des infrastructures à disposition ; il n’y a donc pas de gros investissement à faire. En contrepartie, la ferme doit être exploitée en respectant l’esprit du projet : une production diversifiée, valorisée en circuit court. Les agriculteurs s’engagent aussi à fournir au GRAB toutes les données nécessaires à la poursuite de ses recherches : comptabilité, temps de travail, intrants utilisés… Ainsi, le GRAB peut modéliser le système dans l’idée de le reproduire ailleurs.
« Dans un environnement de monocultures, on est un peu perçus comme des hurluberlus, car c’est très rare aujourd’hui d’avoir une ferme avec un peu de tout. Il faut que les gens viennent à nous pour voir comment ça se passe, et que le bio se développe. »
Julien, agriculteur à La Durette.
Explorer toutes les facettes d'un projet
Fondation de toutes les causes, La Fondation de France peut soutenir un même projet à travers plusieurs de ses programmes. Un projet concernant les enfants, par exemple, pourra être considéré sous l’angle de la santé, de l’habitat ou encore de la culture. Cette approche croisée permet de suivre les actions dans la durée et d’en explorer toutes les facettes. Ainsi, le projet de la ferme de La Durette, d’abord repéré dans le cadre d’un projet de recherche, a pu passer à une phase d’expérimentation grâce au soutien de la Fondation de France et de la Fondation Daniel et Nina Carasso.
Le projet de La Durette est soutenu depuis 2011 par la Fondation de France, la Fondation Daniel et Nina Carasso, la Fondation Terra Symbiosis et la Fondation Un Monde Par Tous.
La Durette, pionnière de l'agroforesterie
Le mot de Thierry Gissinger
Thierry Gissinger est responsable du programme Environnement de la Fondation de France.
« La Durette présente une grande légitimité territoriale et scientifique dans le cadre de notre programme Agro-écologie et alimentation. Il commence à produire des effets au-delà de ce que nous avions imaginé au départ : de l’aspect expérimental, on est passé à la promotion de systèmes agro-écologiques appliqués. Avec ce projet, nous avons pu accompagner une tendance émergente qui est aujourd’hui au coeur de l’intérêt général ».
L'éclairage de Guilhem Soutou
Guilhem Soutou est chargé de mission des programmes Alimentation durable de la Fondation Daniel et Nina Carasso.
« La Fondation Daniel et Nina Carasso travaille sur l’alimentation « de la fourche à la fourchette ». La Durette nous intéresse, car c’est une co-construction entre la démarche scientifique du GRAB et les agriculteurs. Or, il y a une véritable attente aujourd’hui sur de nouvelles techniques de maraîchage plus respectueuses des hommes, des femmes et des écosystèmes. Notre espoir est que les choix faits par La Durette, qui engagent sur 20 à 25 ans, puissent être transposés ailleurs ».
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