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Le point de vue de Françoise Nyssen : « Il est urgent de vivre en partage »

25 septembre 2019

Ancienne ministre de la Culture, Françoise Nyssen dirige la maison d’édition Actes Sud. Engagée pour l’accès à la culture et la préservation de l’environnement, elle nous livre ici sa vision de la philanthropie éthique et décloisonnée.

Françoise Nyssen, ancienne Ministre de la CultureQuel rôle peut et doit jouer la philanthropie dans nos sociétés ?  

J’entends le terme « philanthropie » au sens de don, de solidarité avec les autres. Le matériel, l’enrichissement personnel ne peuvent être des objectifs satisfaisants, individuellement comme collectivement. La question de la philanthropie doit être posée de façon éthique, philosophique : elle ne peut servir à la valorisation de soi-même, ou conférer à ceux qui la pratiquent une position dominante.

La philanthropie a pour finalité de faire en sorte que les Hommes vivent mieux ensemble, en plus grand respect les uns des autres. L’idée de lien est intrinsèque à nos vies, et face aux menaces, il est urgent de vivre en partage et de sortir de la pensée en silo : il faut envisager les défis actuels de façon globale. Tout est lié !

Comment peut-on donc agir de manière globale sur les enjeux de notre temps ?

La solidarité envers les plus démunis, les enjeux éducatifs et culturels ainsi que la transition écologique sont des sujets majeurs dont on doit s’emparer de manière décloisonnée.

La culture peut constituer le vecteur entre ces différents domaines : la pratique des arts, l’éveil au sensible dès le plus jeune âge amènent à plus de conscience, à plus de responsabilité de l’individu, à plus de disponibilité pour les autres, à plus de capacité à être avec les autres. La « santé culturelle » favorise la santé psychique, physique, développe la confiance en soi, la capacité d’être, d’affronter, de faire. S’exprimer à travers un art, c’est partager.

L’école a également un rôle très important : il peut s’y forger de véritables consciences écologiques, et cela pollinise les familles, la société dans son ensemble. Car le respect de la nature est un sujet fondamental : la terre est notre plus grande richesse, et à force d’intrants, nous sommes en train de la tuer. L’usage des produits chimiques a des répercussions sur l’environnement bien sûr, mais aussi sur la qualité des aliments, et donc sur notre santé… c’est un cercle vicieux. Nous devons retourner à la permaculture et à l’agroécologie.

« La question de la philanthropie doit être posée de façon éthique, philosophique. »

En tant qu’ancienne ministre de la Culture, comment pensez-vous l’articulation entre l’intervention de l’État et les actions du secteur philanthropique ?

L’éducation, l’écologie, la culture ne sont pas des prérogatives exclusives de l’État, et les initiatives privées d’intérêt général sont complémentaires de l’action étatique, elles l’enrichissent. Chacun peut contribuer au bien commun, et pour avancer, il faut laisser le champ à l’expérimentation, au droit à l’erreur.

L’École du Domaine du possible que j’ai créée avec mon mari est portée par un fonds de dotation constitué de ressources privées, mais sa mission relève bien de l’intérêt général : notre ambition est de rendre accessible la connaissance à tous les enfants, en prenant en compte la singularité de chacun d’entre eux grâce à des pédagogies alternatives. Si l’Éducation nationale peut s’emparer de ce type d’initiative et en tirer bénéfice pour évoluer, c’est formidable !

Le programme des Nouveaux commanditaires de la Fondation de France illustre aussi très bien cette complémentarité : encore peu connu, c’est un nouveau mode de pratique démocratique qui est plus que jamais d’actualité. Il s’agit d’un accompagnement à la création d’une œuvre d’art, qui répond aux désirs et aux besoins qui sont exprimés par les citoyens sur un territoire, et non pas par les autorités publiques. Des besoins qui peuvent être d’ordre éducatif, social, environnemental… Ce modèle de démocratie culturelle est exemplaire et nécessaire, et c’est la force de la philanthropie que de pouvoir expérimenter ce type d’actions.

Comment mobiliser plus largement ?

Pour susciter plus d’engagement, les artistes ont un grand rôle à jouer. Leurs voix nous disent le monde, peuvent apporter un regard, une espérance, une vision qui nous amènent à prendre en considération, à changer, à œuvrer… et par là même à donner un sens à chacune de nos vies.

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