Redonner la parole aux journalistes exilés
À l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, la Maison des Journalistes, soutenue par la Fondation de France, et l’agence Magnum Photos s’associent pour donner la parole à des journalistes réfugiés en France. Une exposition itinérante est inaugurée ce 3 mai sur les grilles de l’Hôtel de Ville de Paris et un journal distribué gratuitement, mêlant photos et témoignages forts autour de la notion d’exil et d’accueil.
Hicham Mansouri est arrivé en France il y a trois ans, après avoir fui son pays, le Maroc, où il était poursuivi pour « atteinte à la sécurité de l’Etat ». Son crime ? Avoir créé l’association marocaine pour le journalisme d’investigation (AMJI) et enqueté sur la surveillance en ligne dans le royaume.
Comme lui, ils sont des dizaines chaque année à devoir prendre le chemin de l’exil pour échapper à des régimes qui bafouent la liberté de la presse. Pour rendre hommage à ces journalistes, la Maison des Journalistes, soutenue par le programme Solidarité Migrants de la Fondation de France, et l’agence Magnum Photos inaugurent ce 3 mai, une exposition en partenariat avec la Mairie de Paris. Un journal, intitulé « D’ici » et tiré à 40 000 exemplaires, sera également distribué dans des centres culturels en Ile-de-France, des festivals de journalisme et des lycées.
« D’ici est né d’une collaboration évidente entre la Maison des Journalistes, qui accueille et accompagne des journalistes exilés et Magnum Photos, afin de donner au public une image différente de celles habituellement associées à l’exil. A l’heure où les réfugiés sont si souvent stigmatisés, nous voulions leur offrir un espace d’expression pour qu’ils nous parlent librement de leur parcours. Ces journalistes apportent beaucoup à leur pays d’accueil, c’est aussi ce que nous voulions mettre en avant », explique Darline Cothière, directrice de la Maison des Journalistes, à Paris.
Huit binômes composés de journalistes en exil et de photographes de Magnum croisent ainsi leurs regards pour raconter leurs expériences très personnelles de l’exil, de l’accueil, de la répression et de la résistance... Hicham Mansouri a choisi de parler de la prison, où il a passé 10 mois de détention. Avec son binôme, le photographe italien Paolo Pellerin, ils ont questionné le rapport aux corps, à l’espace et au temps dans le milieu carcéral.
« C’est en prison que j’ai compris l’importance de la marche, explique le journaliste marocain. Elle est vitale. Je me suis rappelé du loup dans la cage du zoo de Ouarzazate, ma ville natale. Il faisait d’incessants tours et va-et-vient. Durant mes premières promenades, j’ai remarqué que tous les prisonniers tournaient dans la cour dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Je me suis dit : voilà ce que veut dire « tuer le temps ».
Hicham Mansouri
Pour Hicham Mansouri, ce projet d’exposition et de journal est un moyen de partager et de transmettre son expérience, notamment auprès des plus jeunes. « Quand on a été victime de la répression d’un Etat qui a cherché à vous faire taire et à gommer votre existence, pouvoir à nouveau s’exprimer librement et tout simplement faire son travail de journaliste est extrêmement précieux. En cela, D’ici est un projet artistique et engagé ».
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