Avec la Fondation pour la Comédie-Française, la philanthropie brûle les planches
Début juin, comme chaque année, la Comédie-Française dévoile le programme de sa nouvelle saison. Coup de projecteur sur sa Fondation, qui rassemble donateurs et mécènes amoureux du théâtre et leur contribution au rayonnement de la maison de Molière.
« Ligne 7 ». Derrière ce nom de code, un projet d’écriture mené par la Comédie-Française avec une quinzaine d’adolescents, tous scolarisés dans des lycées situés sur la ligne 7 du métro, du Val-de-Marne à la Seine-Saint-Denis en passant par Paris.
« Epidaure », son festival et son théâtre antique de renommée internationale. En juillet prochain, la troupe de la Comédie-Française y donnera Electre/Oreste d’Euripide, mis en scène par Ivo van Hove.
Entre ces deux projets, 2500 km de distance mais un point commun : ils ont pu être financés grâce aux donateurs réunis par la Fondation pour la Comédie-Française. Un éclectisme qui caractérise bien l’engagement de cette fondation, porteuse d’une large gamme de projets, tant dans le domaine de la création, de la diffusion, de l’accès à la culture, du patrimoine ou de la transmission des savoir-faire. Et qui est devenue, en quelques années, un élément clef de son développement.
Une toute jeune fondation, pour une institution vieille de 340 ans !
Créée en 2016, la Fondation pour la Comédie-Française n’a que trois ans, mais elle a pris le relai des actions d’encouragement du mécénat mis en place depuis 2006 par la maison de Molière. « Quand Eric Ruf a été élu à la tête de la maison, en 2014, c’est sur un programme extrêmement ambitieux, souligne Marie-Claire Janailhac-Fritsch, présidente de la Fondation. Il s’agissait de mettre la Comédie-Française au niveau des plus grands théâtres internationaux, comme le Barbican de Londres ou le Schaubühne de Berlin. D’y attirer les metteurs en scène les plus en vue, d’organiser des tournées internationales, de présenter notre travail lors des plus grands festivals… ». Une ouverture et un changement d’échelle qui ont un coût, et qui nécessitaient de trouver de nouvelles sources de financement. « La solution s’est rapidement imposée : créer une fondation. C’est en effet la structure juridique la plus simple et la plus puissante pour bénéficier d’un cadre incitatif et rassurant pour tous les philanthropes amoureux du théâtre, poursuit-elle. Et le choix d’être abrité par la Fondation de France nous permettait d’être très rapidement opérationnel. Notamment à l’international, avec des structures comme le Transnational Giving Europe et les american Friends, pour bénéficier de la générosité de donateurs étrangers. »
Passée de 40 à 130 grands donateurs
Pari réussi. Le nombre de mécènes individuels a été multiplié par trois, et aujourd’hui, la Fondation contribue pour 12% aux fonds propres de la Comédie-Française. Sa stratégie est en effet intimement liée à celle du théâtre, selon une mécanique rigoureuse. « En début d’année, chaque département présente une série de projets pour lesquels des financements complémentaires sont nécessaires, explique Delphine de Gouyon, chef du service mécénat et entreprises. La direction nous indique ses priorités et ce programme sera notre feuille de route pour l’année. » Chaque action retenue fait l’objet d’une prospection spécifique. En effet, la rénovation du patrimoine, un atelier pédagogique, la création d’un nouveau spectacle, une tournée internationale ou l’acquisition d’un manuscrit de grande valeur pour le musée… Tous les projets n’intéressent pas les mêmes mécènes ! Certains vont mobiliser les donateurs individuels, d’autres vont faire sens pour une entreprise. Trouver le « bon philanthrope » pour chaque dossier constitue un travail d’analyse et de recherche sur-mesure. Complété naturellement par une politique de relation-donateurs, conçue pour récompenser leur générosité. « Et sur ce terrain, nous sommes condamnés à être créatifs, précise Marie-Claire Janailhac-Fritsch. En effet, notre mission première est d’ouvrir le théâtre au public, de servir nos abonnés, et nos spectacles jouent rapidement à guichets fermés. Nous ne pouvons donc offrir qu’un nombre limité de places à nos donateurs. En revanche, les visites privées, les rencontres avec la troupe, les avant-premières, les actions de communication… Toutes les formules sont imaginées pour créer une relation durable et forte avec nos philanthropes. »
En chiffres
1,6 M€ collectés
130 mécènes individuels, regroupés en cinq cercles
30 entreprises et fondations mécènes, notamment la Caisse d’Epargne d’Ile de France, Grant Thornton, la Fondation d’entreprise Michelin
3 grands domaines d’action : création / diffusion et transmission / Patrimoine
L'action culturelle et les projets éducatifs, soutenus par la Caisse d'Epargne-Île-de-France.
Les Damnés, d'après Luchino Visconti, mise en scène d'Ivo van Hove, en tournée à New York (2018), pièce soutenue par le mécène Etienne Binant.
La Nuit des rois, de Shakespeare, mise en scène de Thomas Ostermeier, spectacle soutenu par Grant Thornton.
© Jean-Louis Fernandez
La salle Mounet-Sully restaurée grâce à la Fondation d'entreprise Michelin, la Fondation Total et la Fondation du Patrimoine.
Le plateau et la cage de scène. La restauration des armoires électriques a été financée par Schneider Electric.