Comment organiser le confinement des malades, gérer la pénurie de matériels, renforcer les effectifs, communiquer avec les familles… ? Pour les équipes soignantes, en ville comme à l’hôpital, l’épidémie a entrainé de nombreuses questions à la fois organisationnelles et humaines. La plateforme ENTRAIDE, proposée par la Croix-Rouge Française et soutenue par la Fondation de France, ouvre un espace de dialogue et d’échanges de bonnes pratiques.
Depuis le 2 avril, tout « professionnel du soin » - qu’il soit infirmier, médecin, aide à domicile ou administratif, dans le secteur public ou privé, qu’il pratique en ville, à l’hôpital ou en établissement … - peut échanger avec ses confrères et consœurs, grâce à la Plateforme Entraide, proposée par la Croix-Rouge Française. Un espace où, anonymement, chacun peut poser une question, partager ses doutes comme ses « bonnes pratiques » autour du Covid-19. Et bénéficier des réponses de la communauté.
Au cœur de la démarche, un constat : la crise sanitaire pose de nombreux problèmes à la fois inédits et urgents, et le seul cadre normatif ne peut y répondre. « Bien sûr, les soignants ont besoin d’instructions globales, mais la réglementation ne peut pas tout prévoir, et pour une mise en œuvre à la fois efficace et humaine, ces instructions doivent être appliquées avec discernement, au cas par cas. C’est dans cet espace d’initiatives que les soignants ont besoin d’être écoutés et d’échanger », explique Johan Girard, délégué national Personnes âgées et domicile à la Croix Rouge Française, et porteur du projet.
Les aidants ont besoin d’entraide
Outre l’hôpital et les établissements médico-sociaux, la bataille du Covid se joue aussi… à domicile. Pour toutes les familles qui vivent avec une personne infectée, pour toutes celles qui ont accueille à la maison, pendant la période de confinement, une personne handicapée, une personne âgée dépendante… à partir de mi-avril, la plateforme ENTRAIDE s’ouvre également aux aidants familiaux.
Concilier sécurité et humanité
Se pose par exemple la question de la fin de vie et du décès, à l’hôpital ou en Ehpad. Jusqu’à présent, les visites de la famille et la toilette mortuaire étaient interdites pour des raisons compréhensibles de sécurité. Mais ces principes se heurtent à l’impératif d’humanisation des soins et de respect du deuil ! Autre problématique relevée : l’application du confinement dans les unités pour personnes atteintes d’Alzheimer, pour qui l’enfermement peut générer un niveau d’angoisse insupportable… Outre ces problèmes éthiques, nombre de questions portent aussi sur l’organisation pratique des services, ou sur des questions juridiques. Par exemple autour de l’accès à la réserve sanitaire, des salariés âgés ou fragiles, du retour des résidents en Ehpad dans leurs familles, etc. « La plateforme permet aux professionnels de soulever toutes ces questions, et d’évoquer concrètement des solutions conciliant sécurité sanitaire, respect du droit et dignité humaine », souligne Johan Girard.
Les aidants ont besoin d’entraide
Outre l’hôpital et les établissements médico-sociaux, la bataille du Covid se joue aussi… à domicile. Pour toutes les familles qui vivent avec une personne infectée, pour toutes celles qui ont accueille à la maison, pendant la période de confinement, une personne handicapée, une personne âgée dépendante… à partir de mi-avril, la plateforme ENTRAIDE s’ouvre également aux aidants familiaux.
Un outil, trois fonctions
Dès la première semaine, la plateforme a enregistré 500 inscrits. « Au début, essentiellement des personnes ayant des fonctions d’organisation et de management : cadres de santé, directeurs et fonctions supports des établissements, etc. Mais notre objectif est de toucher les acteurs qui sont au front : infirmiers, aides-soignants et médecins. C’est la diversité des approches qui fait la richesse des échanges. Ainsi, sur une question autour du deuil, posée par un infirmier, c’est une sociologue travaillant à l’hôpital qui apporté la réponse jugée la plus utile ! ».
Ce pari de l’intelligence collective présente un triple intérêt. D’abord, la fluidité et la réactivité, dans une période ou le temps est compté. Ensuite la capitalisation : le dispositif suscite une remontée d’informations du terrain précieuse pour aider à faire face à la situation. Enfin, et c’est sans doute l’essentiel, l’appui aux soignants, confrontés au risque de surmenage, aux dilemmes éthiques et, à terme, aux risques de développer des syndromes de stress post-traumatiques. Or, dans ce domaine, la plus efficace des préventions reste le partage d’expériences : sortir de la solitude, échanger, se questionner… pour faire face ensemble.