La Prée Mizottière : comment concilier agriculture et environnement
Dans un contexte d’urgence climatique et face aux risques d’érosion et de submersion marine, plusieurs choix d’adaptation sont possibles. Lors des Journées Littoral et Mer 2022, organisées par la Fondation de France, les participants (porteurs de projets, scientifiques, élus, gestionnaires des territoires…) ont visité plusieurs projets afin de montrer la diversité de ces options. Visite en images du domaine de la Prée Mizottière qui a opté pour une stratégie de défense de submersion marine par le déplacement de leur digue.
Situé dans un estuaire, la Prée Mizottière était un domaine agricole qui pratiquait une agriculture intensive de céréales. Grâce à l’installation d’une digue de défense contre la mer, les prés salés sont devenus des terres agricoles. A la suite des tempêtes successives dont la tempête Martin en 1999, la digue a été endommagée. En 2001, le Conservatoire du Littoral a choisi d’acquérir ces terres pour les transformer en espace protégé, tout en mettant en place une activité d’élevage. Une ferme en polyculture-élevage, basée sur la fauche et le pâturage des prairies par les troupeaux, a ouvert ses portes en 2004. Puis, la digue a été déplacée permettant ainsi à l’eau de s’infiltrer à chaque marée. Les bénéfices sont nombreux : environ 10 hectares de prés salés ont été créés, ces terres transformées en étangs améliorent l’accueil des oiseaux d’eau, la flore marine reprend vie et l’exploitation agricole adjacente est protégée de la mer.
La restauration de ces prés salés est un enjeu important en termes de biodiversité et d’adaptation aux changements climatiques. En effet la Prée Mizottière constitue un site majeur du marais poitevin pour l’avifaune aquatique. Le projet, débuté il y a 2 ans, apporte une meilleure connaissance du fonctionnement des dépoldérisations naturelles de ces petits marais. Il fait partie des 187 projets soutenus par la Fondation de France en faveur de la protection du littoral et de la mer et des écosystèmes menacés.
Les journées littoral en images
Visite de la Prée Mizottière avec Régis Gallais, conservateur de la réserve naturelle de la Baie de l’Aiguillon
La visite de la Prée Mizottière a débuté par le constat de l’érosion qui s’est créée naturellement à la suite du retrait de l’ancienne digue. Les marées successives ont provoqué l’érosion de la digue et des fonds. Elles ont également facilité le transport de sédiments marins, apportés et mélangés avec l’eau douce de la Sèvre Niortaise.
La ferme de la Prée Mizottière
Située dans l’estuaire de la Sèvre Niortaise, à proximité immédiate de la Baie de l’Aiguillon, la ferme de la Pré Mizottière comprend une surface de 260 hectares. Elle est constituée d’anciens prés salés (mizottes) qui ont été progressivement endigués et mis en culture au cours du XXème siècle.
Une exploitation en polyculture-élevage
Cette exploitation était dédiée à la production intensive de céréales jusqu’en 1999. Lors de la tempête Martin, un bateau a traversé la digue et a créé une brèche dans la partie haute de cette dernière. Son acquisition par le Conservatoire du Littoral en 2001 a permis la transition vers une exploitation agricole davantage basée sur la fauche et le pâturage des prairies. Le Conservatoire a accompagné cette démarche en construisant des bâtiments d’élevage adaptés.
Construction d’une nouvelle digue
« La stratégie de défense face à la submersion marine, c’est d’avoir reculé la digue. La Sèvre rongeait l’ancienne digue, avançait sur les terres et mettait en péril ce polder agricole. En déplaçant cette digue d’une centaine de mètres, on met devant un rideau de prés salés qui va atténuer l’effet de houle, donc la dégradation de la nouvelle digue » explique Régis Gallais, conservateur de la réserve naturelle de la Baie de l’Aiguillon.
Le phénomène d’érosion naturelle
En octobre 2020, dans le cadre du projet LIFE Baie de l’Aiguillon, le choix a été fait de dépoldériser, c’est-à-dire qu’une surface de 10 hectares de terre cultivée a été rendue inondable en supprimant la digue. La brèche de l’ancienne digue a permis à l’eau de mer de s’infiltrer dans le pré salé, créant une érosion naturelle. Ainsi le niveau du pré salé s’élève plus rapidement que le niveau de la mer.
Les sédiments et la végétation
Les sédiments marins entrent à chaque marée importante (4 à 6 fois par mois). Grâce à l’apport de sédiments, « on constate lors de nos visites, tous les 4/5 mois, que de nouvelles espèces végétales font leur apparition. Au début, il s’agissait d’espèces colonisatrices, puis des espèces de marais salés. La diversité a augmenté au fur et à mesure », explique Manuel Salgueiro-Simon, étudiant doctorant à l’Université de Bretagne Occidentale. La dépoldérisation a permis une recolonisation rapide de la végétation et une forte sédimentation naturelle.
Le retrait de ligne de côte
A chacune de ces marées hautes, l’érosion provoque des méandres qui permettent aux sédiments marins de se déposer et d’enrichir tout le site. « Si on creuse sur une dizaine de centimètres, nous tomberons sur les anciennes terres agricoles » explique Régis Gallais.